Pour le clap de fin de la saison 1, nous vous transportons dans un monde bavard où nous échangeons en bonne intelligence avec tous les animaux.
— Plouf, tu as une drôle de voix ce matin. Qu’est-ce qu’il se passe ?
— J’ai le bourdon. À chaque fois, cela me donne des fourmis dans la gorge.
— Tu veux le sirop que le véto a prescrit ?
— Ton véto est un drôle d’oiseau. Il donne des remèdes de cheval pour un simple mal de gorge.
Mistigri attaque votre canapé avec ses griffes.
Milou aboie pendant votre sieste.
Pony se cabre devant un pissenlit et vous éjecte de son dos.
Pourquoi vos animaux agissent-ils ainsi ?
Pour ne plus être la victime des animaux, vous aimeriez qu’ils puissent s’exprimer de manière claire et intelligible. Manque de chance, l’Homme est le seul à se servir des mots. Les autres espèces utilisent d’autres formes de communication qui sont souvent complexes : les fourmis communiquent entre elles de manière visuelle, tactile, sonore et chimique. Les grands singes échangent avec des gestes et des vocalisations.
De nombreuses recherches tentent de comprendre les systèmes de communication des animaux.
C’est déjà demain
On chuchote dans les oreilles des chevaux
Saint François d’Assise est le premier homme à communiquer avec les animaux. Après avoir discuté avec un loup pour l’empêcher d’attaquer une ville, il explique aux oiseaux qu’ils sont vraiment privilégiés : « Le créateur vous a donné des plumes pour vous vêtir, des ailes pour voler et tout ce dont vous avez besoin pour vivre… Vous n’avez ni à semer ni à moissonner. Vous avez le vivre et le couvert sans que vous ayez à vous en inquiéter. »
Quelques siècles plus tard, on abandonne la morale pour chuchoter dans les oreilles des chevaux ou des cochons. Une étude de 2022 montre que ces deux animaux ont une fine perception des sons. Ils sont capables de différencier les sons chargés négativement ou positivement.
On enregistre les animaux et on comprend leur codes
Partout dans le monde, les chercheurs ont sorti les micros.
Des Américains enregistrent des dizaines de milliers de clics de cachalots. Une chercheuse danoise décortique des cris de cochons. Une éthologue américaine capte les barrissements d’éléphants. Un autre, en Italie, s’attaque aux miaulements des chats. Une Allemande s'intéresse aux croassements des corbeaux, un Américain aux aboiements des chiens, etc.
Le biologiste marin, David Gruber s’est intéressé aux baleines qui communiquent en utilisant des « codas ». Les suites de codas semblent avoir la structure d'une conversation. Il pense que lorsqu’on décryptera cette structure, on pourra parler avec les baleines.
Des chercheurs de l’université du Delaware décodent des sons émis par les souris. Ils ont réuni quatre rongeurs et les ont laissés interagir pendant cinq heures en enregistrant l’ensemble de ces échanges. Une IA a ensuite été sollicitée afin de mieux comprendre dans quelles circonstances les vocalisations sont émises.
On tente de créer un Google traduction animale
Cofondée par Katie Zacarian, Aza Raskin et Britt Selvitelle, Earth Species Project est une organisation à but non lucratif, basée en Californie qui utilise l’IA pour décoder la communication non humaine.
Les chercheurs travaillent sur des oiseaux, des primates, des éléphants, des insectes, des amphibiens, mais aussi de certains animaux de compagnie comme les chiens et les chats.
La communication des cétacés retient particulièrement leur attention : « Les cétacés sont particulièrement intéressants en raison de leur histoire longue de 34 millions d’années. Et parce que, comme la lumière ne se propage pas bien sous l’eau, une grande partie de leur communication est forcée par le canal acoustique. », dit Katie Zacarian.
On décrypte les cris des poulets
Adrian David Cheok de l’université de Tokyo dirige une équipe de chercheurs qui essayent de traduire les cris de poulets en langage humain.
Ils ont enregistré les cris de 80 poulets. Ces sons sont rassemblés dans une base de données qui est traitée par une intelligence artificielle. Le programme définit des émotions pour les cris. La sensation de faim, la peur, la colère, l’excitation se situent en haut de la liste. Pour cet étiquetage des sons, l’équipe a été aidée par des psychologues animaliers et des vétérinaires.
On crée des dispositifs pour échanger avec les animaux
Après avoir décrypté le langage des animaux, il faut créer les conditions d’échange.
On commence par une solution basique.
La société américaine FluentPet propose un tapis avec des boutons à actionner du bout de la patte par le chien ou le chat de la famille. En appuyant dessus, Tigrou et Milou disent qu’ils veulent sortir, manger, jouer… Les boutons étant reliés au réseau, le propriétaire reçoit un SMS quand il n’est pas là. Avant, chienne de vie, il faut les entraîner à pousser le bon bouton.
Earth Species Project envisage de construire une baleine ou un corbeau synthétique qui communique avec les vrais animaux. L’idée est que ces animaux ne réalisent pas qu’ils ne parlent pas à l’un de leurs pairs.
Et si demain on pouvait discuter avec les animaux
Un remède de cheval à l’anthropocentrisme
Plus de 8 millions d'espèces partagent notre planète. Et nous sommes capables de ne comprendre qu'une seule d'entre elles… Et encore!
La religion de l’homme est de mépriser les autres espèces. La Bible l’autorise à adopter un comportement de prédateur de la nature :
Dieu bénit Noé et ses fils, et leur dit : « Soyez féconds, multipliez, et remplissez la terre. Vous serez un sujet de crainte et d’effroi pour tout animal de la terre, pour tout oiseau du ciel, pour tout ce qui se meut sur la terre, et pour tous les poissons de la mer : ils sont livrés entre vos mains. » La Bible – Genèse, 9
Convaincus que nous sommes les plus intelligents sur cette Terre, nous nous accordons le droit de vie et mort sur les autres espèces.
Si, par les échanges, les animaux nous font comprendre que nous ne sommes pas les moutons à cinq pattes que nous croyons être, on révisera notre copie. On deviendra respectueux de toutes les autres espèces. Au lieu de détruire leurs écosystèmes, on les protégera. Les Hommes deviendront les gardiens de la diversité des espèces.
On profitera des savoirs des animaux
Enfin, cela arrivera sans doute après des échanges avec des cétacés. Les humains parlent et s'expriment depuis 100 000 à 300 000 ans. Les baleines et les dauphins communiquent vocalement et transmettant culture et chants, depuis 34 millions d'années. Leur expérience et leur sagesse pourront nous faire passer du coq à l’âne. Et puisqu’on parle, on pourra apprendre la lenteur et l’opiniâtreté avec cet animal.
D’autres animaux pourront nous aider à changer le management de nos entreprises. Ils pourront choisir entre le management autoritaire et protecteur du gorille ou celui plus démocratique des buffles d’Afrique, des cerfs, des pigeons et des babouin. Le chef ne prend pas les décisions, elles sont soumises à un vote auprès des subordonnés. Chez les buffles d’Afrique, les femelles adultes expriment leur choix en se levant et en fixant du regard une direction avant de se recoucher. Ou encore. Le management d’expérience des éléphants. Les femelles les plus âgées dirigent le groupe. Ces matriarches ne sont pas des leaders autoproclamés, elles sont choisies par la famille.
Prendre la souffrance animale par les cornes
Les poulets de batterie évoqueront les conditions épouvantables de cette vie en cages.
Les taureaux mettront des brandilleras pour lutter contre la cruauté stérile des corridas.
Les souris hurleront contre les expérimentations qui les déciment.
Les dauphins de Bali protesteront contre le limage de leurs dents destiné à protéger les touristes
Les chiens soutiendront la loi destinée à interdire les colliers électroniques à pointes.
Les animaux évoqueront les conditions de mort dans les abattoirs. Poussins étouffés ou broyés vivants, oies et canards violentés pour le foie gras, poules pondeuses et lapins en cages… Ils n’auront pas assez de mots pour raconter toutes les souffrances. Enfin, sans doute assez pour nous inciter à ne plus continuer à nous nourrir d’eux.
Les chercheurs qui travaillent sur la communication animale espèrent que leurs travaux transformeront notre relation avec le reste de la nature et nous pousseront à protéger les espèces menacées.
N’étant pas une oie blanche, je n’ignore pas que cette communication avec les animaux ne va pas juste contribuer à construire le meilleur des mondes. Elle a aussi ses limites.
Une communication qui ne casse pas trois pattes à un canard
De quoi va-t-on parler avec les animaux ?
De la réforme des retraites. Pas certain que cela va passionner les baleines.
De son dernier tour de bocal avec Plouf !
Des likes de ses vidéos avec Fritz le chat.
De leur taux de cholestérol élevé à cause de tous les déchets avec les rats de Marseille.
Des différences entre ChatGPT et ChienGMORDU
Les échanges avec les animaux risquent de manquer de chien.
Éviter de faire l’autruche
À la manière de l’appeau du chasseur qui attire le gibier, cette technologie ouvre la porte à de multiples façons de manipuler les animaux, d’exploiter ou de domestiquer des espèces sauvages, d’altérer des cultures animales…
Ces conversations pourraient bouleverser les habitudes des animaux. « Si nous ne faisons pas attention, nous pourrions perturber une culture vieille de 34 millions d’années, ce qui serait une tragédie monumentale », avertit une chercheuse. Il faudra donc se montrer prudent avant de se prendre pour une princesse Disney.
Futureusement vôtre
Anne-Caroline
NB : Pour la deuxième saison, nous aimerions peut-être trouver un partenaire qui aimerait sensibiliser ses collaborateurs à une réflexion sur le futur. Si c’est votre cas, n’hésitez pas à nous contacter.